Cet article est une réflexion sur l’intérêt d’un regroupement (régional voir national) des micro-torréfacteurs pour lutter efficacement contre les industriels du marché. En effet, ces industriels possèdent des moyens que les petites entreprises ne peuvent pas utiliser pour placer leurs produits, des moyens qui n’ont rien à voir avec la qualité du produit.
Commençons par définir la micro-torréfaction en Suisse et Suisse Romande en particulier, chose qui n’est pas si simple. Définir la torréfaction industrielle, c’est relativement simple: le volume de production est élevé et les machines utilisées sont du genre industrielles. Cela devient un peu plus compliqué lorsque l’on essaie de trouver la limite industriel-artisanal ou industriel et micro-torréfacteur. Quelle est cette limite ? 10 tonnes/an, 50 tonnes/an, 100 tonne/an ? Est-ce qu’un torréfacteur présent dans la grande distribution peut toujours être considéré comme micro-torréfacteur ? Toutes ces questions n’ont pas de réponses simples, malheureusement. Parfois c’est une impression plus que la réalité. En Suisse Romande, on a l’impression que La Semeuse est un torréfacteur artisanal alors qu’avec plus de 1000 tonnes/an et une présence chez les principaux grands distributeurs, c’est clairement un torréfacteur industriel !

Essayons de donner une définition propre à l’Académie du Café. Un micro-torréfacteur devrait répondre à des critères qui sont décrits ci-dessous:

  • Volume inférieur à 10 tonnes/mois ou 120 tonnes/an
  • Equipements (torréfacteurs) de maximum 30kg/batch (voir 60kg/batch si les volumes sont proches de 120T/an)
  • Connaissance de la chaîne du café, de la graine à la tasse, plus particulièrement du café vert et de la torréfaction
  • Torréfaction réalisée par un « maître » torréfacteur et non pas par un opérateur de production
  • Connaissance des « Specialty Coffees » (ce serait idéal, mais c’est un peu utopiste)
  • Etre membre de la SCA serait judicieux pour se tenir au courant des formations et événements du monde du café de Spécialité
  • Une passion pour le café, évidemment !
Ce qui serait très judicieux, c’est de se réunir afin d’être plus fort dans plusieurs domaines notamment dans l’achat de café vert ou de machines. Ce qui serait encore plus judicieux, ce serait de créer une union des micro-torréfacteurs afin d’être plus fort dans la communication et des propositions aux professionnels de la restauration.

Les vrais concurrents de micro-torréfacteurs ne sont pas les autres micro-torréfacteurs, MAIS les torréfacteurs industriels ! Les vrais concurrents sont Mastro Lorenzo, Lavazza, Kimbo, Segafrredo, etc. Il faut détrôner ces cafés en utilisant les forces et avantages des micro-torréfacteurs: produits locaux de qualité, relation directe, réactivité et flexibilité.

Alors, pourquoi, cela n’existe pas encore ? Il existe bien la Schweizirische Roester Guilde (SRG), mais il s’agit du regroupement des torréfacteurs industriels et les objectifs et ambitions de cette Guilde sont misérables et pas du tout adaptés aux besoins des micro-torréfacteurs. Où se trouve la difficulté d’un regroupement des micro-torréfacteurs ? Mon expérience personnelle de ce monde m’a fait sentir une peur de partager des informations, une peur de perdre des clients, une peur de divulguer des « secrets », bref des arguments pas du tout pertinents face au défi d’être plus fort ensemble que faible individuellement.

Si on imagine que les micro-torréfacteurs se partagent les équipements comme le font les grands industriels, alors on ajoute des compétences et des opportunités aux artisans. Machine à capsules, ensacheuses, torréfacteurs ou moulins, ces équipements seraient mieux utilisés et rentabilisés en commun plutôt qu’individuellement. Le projet de CoffeeAvenue est un exemple de synergies et de win-win pour les artisans torréfacteurs, une plateforme de vente de ces cafés qui permet à l’amateur de café de sélectionner plusieurs cafés de différents torréfacteurs sur une plateforme unique au lieu de commander sur plusieurs sites et recevoir plusieurs paquets en payant plusieurs fois les frais de port. C’est un vrai  projet de partage !

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Un de mes amis m’a dit un jour: 
« Soufrons ensemble, mais proftons individuellement ». 
C’est le grand problème de ces unions de professionnelles. Nous sommes tous prêts à partager nos difficultés, mais dès que nous pouvons gagner un sou, il ne faut surtout pas le partager. Si les micro-torréfacteurs sont prêts à s’unir pour le meilleur et pour le pire (!), peut-être auront-ils une chance de faire trembler les grands industriels du secteur. Un autre de mes amis qui travaille pour l’industrie avait ajouté:

« Tant que les micro-torréfacteurs ne s’unissent pas pour être plus forts, les industriels auront encore de très beaux jours devant eux ! ».

Rendez-vous compte, il n’existe pas de site de référencement des micro-torréfacteurs, mis à part une liste volontaire sur le site de Swisscoffeeguide.ch ou Kaffeemacher. Le site de la SRG est d’un autre siècle ! Chacun joue en solo et souffre parfois en solitaire. Ne serait-il pas le temps de se réunir et de concurrencer de manière efficace les industriels lorsqu’il faut démarcher des restaurateurs ? Le temps est propice au local, à la personnalisation ou au contact direct avec l’artisan. L’artisanat a le vent en poupe, alors il est temps de se réunir ! Qui prendra cette initiative ? J’ai bien quelques idées, mais ce n’est pas sur un blog que je peux les partager, mais uniquement avec ceux qui se sentent concernés.

L’Union des micro-torréfacteurs de Suisse (Romande) DOIT se créer et il est temps de le faire. Pour cela, il faut mettre son ego de côté et vouloir travailler en équipe, se remettre en question et surtout ne pas voir dans les micro-torréfacteurs de concurrents, mais des alliés pour promouvoir ce secteur artisanal !

Les plateformes online permettent aujourd’hui de réunir les cafés de spécialité et de commander plusieurs cafés de différents micro-torréfacteurs. Pour les amateurs de café de spécialité, c’est une aubaine car cela permet d’éviter plusieurs commandes sur plusieurs sites avec plusieurs frais de port 🙁 Le site de CoffeeAvenue est en relation directe avec les micro-torréfacteurs et offre un canal de distribution supplémentaire à ces micro-torréfacteurs. Néanmoins, il faudrait idéalement que la date de torréfaction soit indiquée sur le site lors de l’achat, cela donnerait une énorme crédibilité au site.

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